Magyar Könyvszemle 116. évf. 2000. 2.szám Vissza a tartalomjegyzékhez
Les bibliothécaires, les informaticiens et les professionnels des métiers du livre sintéressent peu au passé de lautoroute de linformation, quasi synonyme de la société dinformation, et aux phénomènes qui la font apparaître. En réalité, lobjet de ma communication nest pas la technologie de la lecture mais la possible superposition de la culture digitale sur la culture traditionnelle ce qui est un des points déterminants de la société de demain. Se référant sur la solidarité et sur le produit intellectuels, les nouvelles formes de communication représentent le superficiel. Il sagit en effet des interdépendances économiques de la culture. Lhistoire de la culture connut une initiative pour réaliser la bibliographie mondiale et la bibliothèque: le Mundaneum. Cette initiative fut cependant condamné à léchec faute dune technologie de communication pour diffuser les résultats dun immense travail de recherche bibliographique et dinnovations. Les moyens de diffusion existent déjà depuis deux décennies. Sa réalisation est appellée communément aujourdhui la bibliothèque virtuelle. Qui sont ses utilisateurs? Des gens et des sociétés virtuels? Jy reviendrai ultérieurement, en parlant de la relation entre le Mundaneum et la bibliothèque virtuelle. Le rêve que le Mundaneum ne put mettre en oeuvre faute de moyens technologiques, se réalisait comme un produit basé sur léconomie de marché.
Les passages historiques de mon exposé sont extraits de loeuvre Cent ans de lOffice International de Bibliographie. Les prémisses du Mundaneum (Mons, 1995 ed. Mundaneum. 368 p.)
Histoire dune vision
Il y avait une fois, deux personnalités publiques française et belge, Paul Otlet et Henri La Fontaine (ce dernier sénateur), qui eurent lidée de fonder lInstitut de Bibliographie Internationale en 1895 et 25 ans plus tard ils prirent linitiative de constituer une bibliothèque mondiale, le Mundaneum. Ce fut bien avant la super autoroute de linformation et lInternet nétait même pas une utopie. Ils rêvaient dun centre du savoir global dont le réseau de communication mondiale a été basé sur la coopération intellectuelle à léchelle mondiale. La comparaison du Mundaneum à lInternet se fait exclusivement sur la base des échanges dinformation et des connaissances scientifiques car le fonctionnement de lInternet est lié avant tout aux objectifs financiers et commerciaux.
Il ny a rien de nouveau sous le Soleil, cest ainsi que nous pourrions résumer les tendances de cette comparaison. Que fut donc ce répertoire mondial des connaissances?
Dans la vision dOtlet et de La Fontaine, lavenir du monde ne peut se baser autrement que sur le répertoire international des histoires et des pensées, laccès et léchange libres des informations. Ils ont trouvé donc nécessaire détablir une bibliographie. Une première conférence internationale fut organisée à Bruxelles, en 1895. À cette occasion, les participants décidèrent de constituer le Répertoire Bibliographique Universel et à fonder lInstitut de Bibliographie Internationale (Universelle). Se basant sur la méthode de classification de Dewey (18511931), lInstitut adopta la Classification Décimale Universelle et la normalisation des fiches de catalogue. LInstitut pouvait accueillir plus de 7 millions de fiches entre 1905 et 1910. Le Musée du Livre fut inauguré en 1906, la Bibliothèque Commune des Sociétés Savantes et le Musée de la Presse Internationale en 1907. Les archives iconographiques, les services de documentation concernant la situation des femmes et lUnion des Associations Internationales qui joue un rôle actif même aujourdhui, furent ouverts au public en 1910. À la fin de la première guerre mondiale, le Musée Technique et Scientifique de lHumanité ouvrit ses portes en 1920, grâce à la générosité du gouvernement belge. Ce fut le Mundaneum.
[231Le rêve dOtlet ne put se réaliser vue son aspect utopique, à savoir que les travailleurs de tous les pays du monde puissent accéder à linventaire des produits intellectuels universels. La Société des Nations entretemps constituée ne lègua daucun pouvoir à lInstitut ni au Mundaneum pour coordonner la vie intellectuelle internationale. Otlet fit publier Le Traité de documentation, le livre sur le livre en 1934, qui fut le premier ouvrage moderne sur linformation scientifique. Cet ouvrage a été réédité en 1989.
Le Mundaneum survécut difficilement durant la Deuxième Guerre Mondiale face aux épreuves de loccupation allemande, les documents ayant dû être souvent déplacés. Il perdit considérablement son importance. Une nouvelle ère commença dans linformation scientifique vue le progrès technologique (stockage et transmission des données), nombreux états-nations sont nés. Le Mundaneum ne put faire face aux nouveaux bonds de lédition. Otlet morut en 1943 et La Fontaine en 1944, probablement avec un goût amère.
En 1993, la Ville de Mons prit linitiative de trouver une place digne pour la documentation et la bibliothèque. Mais ce nest plus que du passé, malgré quaujourdhui plus de 100 milles périodiques belges et étrangères se trouvent encore dans la collection. Les fonds comportant la série des imprimés de petit format, le féminisme, lanarchie et le pacifisme, plusieurs dizaines de milles de cartes postales éditées entre 1900 et 1935, en tout 100 milles.
Universaliste, égalitaire et démocratique, selon cette vision culturelle dOtlet et de La Fontaine lhumanité accède à toute la science écrite du monde. Et existe-t-il une science sans avoir recours à lécriture? Mais cette question nous amène au monde de la culture digitale.
Aventure historique: du Mundaneum à la bibliothèque virtuelle
De la littérature abondante sur la communication de pointe, je cite un ouvrage intéressant: Guisnel, J.: Guerre dans la Cyberspace. Service secrets et Internet. Paris, 1995, La Découverte. 252 p. Le volume présente un bref résumé bien concu sur lhistoire de lInternet. Loin des idéologies, le livre présente les faits et explique que la mise en place de lInternet put se faire lors de la disparition de la guerre froide. En ces nouvelles circonstances internationales, les grandes puissances et certains pays en développement sintéressent davantage à linformation, y compris lespionnage économique, scientifique et technique par voie électronique et comme lauteur ajoute: Mata Hari et James Bond se trouvent désormais sur les étagères des antiquaires.
Pro memoria: plusieurs millénaires se sont déroulés dans lévolution des communications avant darriver à cette technicité. Lécriture nait 3300 ans avant Jésus Christ, elle prend une forme plus développée au cours de la deuxième moitié du IIe millénaire, au XVe siècle, à lapparition de limprimerie, lécriture créée une révolution dans la communication des connaissances. Enfin, éditée entre 17511772 et reconnue pour être le répertoire le plus complet des connaissances, lEncyclopédie du Dictionnaire raisonné des Sciences, des Arts et des Métiers mit les bases dune démocratisation du savoir. A cause des nationalismes, la possibilité de grouper, classifier et de normaliser des connaissances avec les techniques et méthodes traditionnelles na jamais été aussi lointaine que de nos jours. La classification des connaissances généralement reflète les divergences entre les sociétés et les idéologies. Ce constat nest pas loin pour les bibliothèques et pour les bibliographies également. Lespace Internet ayant été créé, la nouvelle technologie de la communication entre en jeu. Ceci tend à la réalisation dun répertoire des connaissances globales et des informations, donc à luniversalité et à la bibliothèque mondiale. Otlet et La Fontaine peuvent se retourner dans leur tombe que leur système de diffusion des connaissances universelles envisagé dans un esprit pacifiste, de tendance franc-maçonnique, socialiste [232et de conviction socialiste (La Fontaine fut membre du Parti Ouvrier Belge) se réalise dans un objectif initialement militaire et sur une orientation commerciale.
En effet, le dicton chinois est plus ou moins valable, peu importe si le chat est de couleur grise ou noire, lessentiel est quil attrape la souris. LInternet technologiquement est apte à changer et échanger globalement les connaissances scientifiques du monde. Linformation est considérée comme marchandise, donc sa motivation et son fonctionnement sur le plan social et culturel reste ouvert. Ce qui est vraiment intéressant et important maintenant, cest daider lalphabétisation et lhomme alphabétisé à élargir les possibilités daccéder aux connaissances.
Au XIXe siècle, on vit apparaître des grandes personnalités qui contribuèrent au développement des bibliothèques, comme p.ex. Dewey, La Fontaine, Panizzi et autres. Le symbole de ce développement fut lInstitut de Bibliographie Internationale avec 15 millions de fiches, mais faute dune technologie de communication, ce fonds dinventaire ne put être utilisé à léchelle internationale.
Pour cette raison, Otlet, dans son oeuvre le Traité, soccupa de la mécanisation de la transmission des données, de la photocopie, des cartes numérisées, de la télécopie et de lécran. Il montra le bon chemin car la technologie fut le point tournant dans la transmission des connaissances et dans la réalisation dune bibliothèque virtuelle.
La bibliothèque virtuelle qui est linterconnexion électronique entre les bibliothèques et dautres sources dinformation, contribue à léchange des informations dans le monde sans que les bibliothèques deviennent des musées. Bien au contraire, un des piliers les plus importants de la culture digitale sinon le plus important est la bibliothèque virtuelle qui est inimaginable sans des fonds documentaires. La conservation et le traitement des collections écrites comme porteurs dinformation sont inimaginables dans lavenir aussi. Aucune technologie informatique ne peut les remplacer, celle-ci contribue de façon considérable à mieux sorienter et à mieux y accéder partout dans le monde, voir la compagnie Amazon aux Etats-Unis qui est le plus grand distributeur au monde des informations sur les livres disponibles. Quotidiennement, sa base de données publie approximativement 2 millions de titres.
Selon Al Gore, vice-président des États-Unis, lidée de lautoroute de linformation fut soulevée en 1978. Dans le système mondial bipolaire, lors de la chute de lUnion Soviétique, un immense de pointe scientifique sest libéré; ladministration en qualité de commanditaire et lindustrie lourde avaient de lintérêt pour maintenir ce potentiel. La bibliothèque virtuelle est le produit de lautoroute de linformation et elle est en même temps sa base. La différence philosophique entre le Mundaneum et la bibliothèque virtuelle est que le premier fut basé sur la générosité de la société civile, tandis que la bibliothèque virtuelle sous-entend en partie linformation basée sur les intérêts économiques. En tout état de cause, la communication de pointe est liée aux moyens financiers.
Lavenir le dira si la bibliothèque virtuelle qui est un des éléments constitutifs du méchanisme de la société dinformation contribuera-t-elle à augmenter lindice socio-économique du bien-être individuel. Est-il possible de le mesurer? Dans certaine mesure, oui.
Cest ainsi quapparaissent la science et le développement culturel montés sur la chaîne de lhistoire, la bibliothèque universelle faisant partie à la fois des intérets économiques et de la culture.
Égalité des chances pour linformation et la bibliothèque virtuelle vers la société dinformation
La bibliothèque virtuelle, lInternet et la cyberespace font partie de le même categorie de la société dinformation globale (y compris le départ par la super-autoroute de linformation). Il ny a pas de raison dans le cadre de cette conférence qui vise aux formes nouvelles de [233linformation,[1] dinitier des discussions sur limpact social de la catégorie mentionnée. Une pareille discussion exigerait une conférence spéciale. Bien sur, jai mes opinions sur cet impact mais ici malgré tout je trouve nécessaire de mentionner deux faits statistiques internationaux importants. La proportion des pays en développement et des pays développés est de 90% à 10% dans la population mondiale. Selon les indices démographiques, cette proportion va continuer en faveur des régions en développement. Lautre fait: selon certaines prévisions, la proportion de la main doeuvre active et des inactifs sera de 20% à 80%. Même en considérant des erreurs de prévision de 25 à 30%, lessentiel ne change pas. De quoi devient donc globale la société dinformation, sans compter la communication de pointe? Je ne souhaite pas analyser ici le contenu de la société dinformation, mais il me semble que la globalisation est valable de point de vue technologique qui, bien sûr, fait possible le mouvement éclair des capitaux et des actions financières et commerciales.
Mais la globalisation culturelle et scientifique pour la majorité du monde est une question de long avenir.
La mondialisation technologique sert aussi à linnovation culturelle qui est tout aussi importante par sa fonction de sauvegarde culturelle, ce qui contribue considérablement au programme de Mémoire du Monde initié par lUnesco.
Ceci dit, la globalisation est un des moyens les plus importants, sinon le plus important du développement économique. Et la culture est la dimension dominante de la société et de lindividu manifestant en soi les traditions, le comportement individuel, les habitudes familiales et sexuelles, lhygiène et, en fin de compte, laccomplissement humain, la solidarité et la tolérence.
Cest pourquoi à mon avis les nouvelles formes et les nouveaux moyens de la communication sont subordonnés à la culture au sens le plus large du mot. Les pays développés traversent une nouvelle ère à divers échelons mais ces pays représentent une partie infime du monde. Cest un paradoxe ou un phènomene contreversial dont une solution minime serait un grand changement dépoque sociale, de même que la nouvelle technologie de pointe a été pour la science et le progrès technique. Selon toute probabilité, même une solution minime consisterait par laugmentation de légalité des chances (louverture totale dune telle égalité est impossible pour différents motifs), mais sera en mesure davancer la culture universelle de pas en pas, pendant des décennies et de siècle en siècle.
Cest une perspective davenir.
RÓZSA, GYÖRGY
[1] * Conférence de lAssociation Internationale de Bibliologie à lUniversité de Salamanque 810. 05. 2000.